Lettre ouverte aux parents responsables (Pierre HAZETTE)
Un titre explicite. Qui se passe de commentaire. À lire. Et à méditer.
Moult propositions utiles, conrètes, bref : originales.
Du pur bon sens, quoi. Que demander de plus ?

 
Le crépuscule des gourous
Il faut le savoir : l'apprentissage de la lecture par la méthode globale est interdit en France.
Il faut, du reste, dénoncer ceux qui ont transformé la pédagogie en un véritable outil de terrorisme ; ceux qui, à force de dénoncer des pratiques autres que les leurs, ont fini par détruire toutes les pratiques quotidiennes en matière d'éducation.
Il n'y a pas de dogme en pédagogie, il y a seulement des pratiques qui réussissent et d'autres qui échouent. La première réforme qui devrait peut-être apparaître serait de respecter les pratiques qui réussissent. Régis DOHOGNE (L' ÉDUCATEUR n° 5 du 06 mars 2002).

Dans son rapport sur l'apprentissage de la lecture à l'école primaire (janvier 1995), l'inspection générale (française) constate que "la formule lire, c'est comprendre a fait des dégâts." En fait, les classes qui réussissent le mieux sont celles où l'instituteur mène de front l'apprentissage du code (correspondance lettres/son ou combinatoire) et l'accès au sens.

Les travaux de la chercheuse Martine Poncelet au sein de l'unité de psychologie cognitive de l'Université de Liège vont dans le même sens. Voir notamment l'article intitulé Panne de décodeur paru dans Athena n° 211 de mai 2005. L'article a été rédigé par Philippe Lambert.

La chercheuse (en collaboration avec Steve Majerus, chercheur F.R.S.- F.N.R.S.) le répète - en insistant - dans un nouvel article, intitulé Le puzzle des mots, paru dans le n° 289 de mars 2013 d'Athena. Le leitmotiv : l'importance de la conscience phonologique. Sans elle, l'apprentissage se fait (plus) pénible.
L'article est rédigé - sous la plume alerte et avertie, comme à l'accoutumée - de Philippe Lambert.

Rendons à César ce qui appartient à César ... et à Borel-Maisonny ce qui appartient à Borel-Maisonny (1900-1995). C'est elle qui, la première, a attiré l'attention - à juste titre d'ailleurs - sur l'importance qu'il convenait d'apporter à la conscience phonologique. Les recherches actuelles ne font que confirmer expérimentalement son intuition de génie. Sa méthode a été publiée initialement en 1949 puis en 1956 dans le Bulletin (mensuel) de la Société Alfred Binet & Théodore Simon.

Et Nina CATACH, docteur ès lettres, directeur de recherche au C.N.R.S., enfonce le clou en affirmant que "Notre orthographe est une orthographe phonologique (à plus de 80 %)" in L'orthographe, Que sais-je ?, page 64 (5e édition corrigée : 1993, décembre).

Et, en page 66 de la 9e édition (mai 2003), elle ajoute ceci : "Une confirmation irrécusable du caractère fondamentalement phonologique de notre orthographe est venue des travaux informatiques (...)". On ne peut pas être plus clair.

Vos commentaires

L'enseignement : un enjeu de taille. Il conditionne en grande partie en effet le bien-être de toute une Communauté. C'est-à-dire son économie. Certains responsables (?) politiques l'oublient trop souvent hélas ! Ou pire encore : feignent de l'ignorer.

Sujets traités ci-dessous : L'apprentissage de la lecture et son automatisme
                                       Comment asseoir l'orthographe de base ?
                                       Faire grandir son enfant
                                       Pour un enseignement de qualité
                                       À méditer
                                    

L'œuvre d'éducation

On est parents pour la vie. Et toujours à temps plein.

Un travail de longue haleine attend les jeunes parents, souvent inexpérimentés, mais toujours bien disposés, toujours animés de bien faire. Ce qui ne dispense pas de quelque(s) maladresse(s).

Car il en faut des qualités pour mener à bien cette entreprise qui vous accapare littéralement. Il faut d'abord beaucoup d'énergie, d'imagination, de persévérance. Du courage aussi par la force des choses. De la ténacité. De la clairvoyance. Il faut le reconnaître sans détour : c'est beaucoup - trop parfois humainement parlant. Mais il faut assumer, coûte que coûte, ne jamais baisser les bras. Toujours de l'avant. Mais, in fine, quelle récompense !

Une composante essentielle de toute éducation, souvent négligée hélas !, est la formation bien comprise du caractère. La pierre angulaire de l'édifice. C'est un peu le moteur de l'individu, son énergie propre. Qui s'autoalimente. Pour son plus grand bien. Une force à vrai dire. Bien canalisée, elle peut faire des merveilles.

L'éducation des autres nécessite un travail sur soi en profondeur. S'analyser pour mieux agir et donc favoriser l'interaction. Sans cette introspection, l'éducation risque de rater son but. Et c'est tout l'édifice alors qui risque de s'écrouler.

En quoi l'éducation est-elle plus difficile de nos jours que dans le passé ? Essentiellement, le danger vient de l'extérieur. Que l'on songe notamment aux drogues dont on dit que tous les milieux scolaires en sont atteints. À vérifier quand même.

La toute première précaution - élémentaire - à prendre est de bien choisir l'établissement, avec beaucoup de discernement donc. Il y a encore heureusement de telles institutions, même si elles se font plus rares.

Se renseigner au préalable auprès de personnes dignes de confiance et, si possible, compétentes. Demander de voir les cahiers et, nec plus ultra, avoir un entretien avec la direction. S'enquérir de la méthode d'apprentissage de la lecture s'il s'agit d'un(e) très jeune enfant.

Préférer la petite école de quartier (toute) proche au grand ensemble, à l'usine à diplômes. Car les moyens de transport sont source de mauvaises rencontres, surtout lorsqu'il s'y ajoute la fréquence, la répétition régulière, presque chronométrique.

Quelle attitude les parents doivent-ils adopter face à ce fléau de la drogue ? Idéalement, tout un travail de fond a dû précéder cette échéance. L'enfant (et plus tard l'adolescent) qui a l'habitude de dialoguer avec ses parents parce que la confiance réciproque règne depuis belle lurette ne posera pas (trop) de problèmes. C'est affaire, en effet, de climat et de motivation. Le jeune en prise directe avec la nature par exemple, grâce notamment aux balades dominicales en forêt, empreint du reste de cette richesse qui lui est offerte, ne prêtera pas attention à ces déviances. Son intérêt sera ailleurs. Car la tentation vient du manque.

La découverte de la nature dans toute sa variété : quelle richesse ! Quel défi aussi ! Vivifiant au propre comme au figuré. Assouvir sa curiosité postule en effet une disposition d'esprit qui sous-tend recherche(s), échange(s). Bref, un travail de documentation considérable si l'on veut aller au fond des choses. À vrai dire, cette recherche n'est jamais finie : c'est ce qui en fait toute sa beauté et sa valeur.

L'apprentissage de la lecture et son automatisme : un moment(-)clé dans la vie du jeune enfant

Distinguons bien l'éveil de l'apprentissage proprement dit

L'éveil

L'éveil se fera en maternelle et en famille. Toutes les occasions sont bonnes pour stimuler l'envie de lire. Avant de mettre au lit vos jeunes enfants, pourquoi pas leur lire une histoire ? Ils en raffolent. Et - ce qui est loin d'être négligeable -, ce genre de lecture calme, apaise. Ils en redemanderont, c'est sûr.

Cette bonne habitude deviendra vite un rituel. Tant mieux. Mais cette séance quotidienne ne suffira pas à instiller chez le jeune enfant l'envie réelle de lire. Il doit baigner littéralement (c'est le cas de le dire) dans une atmosphère, disons studieuse. Si le jeune ne voit jamais ses parents lire, le fera-t-il lui-même spontanément ? Il y a peu de chance qu'il en soit ainsi.

Si le jeune ne dispose pas, de préférence à domicile, d'un choix large de livres adaptés à son âge, il sera freiné, handicapé même dans son désir, son élan d'imiter l'adulte. Car tout est là : l'imitation de l'adulte. Dans ce qu'il a de bon, mais hélas ! aussi dans ce qu'il a de moins positif. Qu'on se le dise : le jeune enfant (et même l'adolescent) a besoin d'un adulte à imiter, qui lui servira de repère, de modèle. Tant mieux si cet adulte présente des atouts. La construction de sa personnalité naissante sera d'autant mieux réussie.

L'apprentissage proprement dit

En pédagogie (et dans tout apprentissage qui se respecte), l'on procède du facile au difficile, du simple au complexe, au compliqué. Tout homme sensé est d'accord là-dessus. Sauf, semble-t-il, les pédagogues en chambre qui imposent à leurs subordonnés, c'est-à-dire les instituteurs et les institutrices, le processus inverse, la démarche contraire. En vertu de quel principe ? Je l'ignore. Chaque fois que j'ai posé cette question du bien-fondé de leur pensée à ces personnes, supposées qualifiées, je n'ai jamais reçu de réponse satisfaisante.

Partons de faits avérés, prouvés, indiscutables car établis scientifiquement. L'orthographe de la langue française est une orthographe phonologique (à plus de 80 % ). Ce n'est pas moi qui avance ce constat, cette vérité. C'est Nina CATACH, docteur ès lettres, maître de recherche au C.N.R.S. Reportez-vous à la page 64 de la 5e édition corrigée (décembre 1993) de son ouvrage. (Voyez la bibliographie sommaire ci-dessous.) Conclusion logique : la seule méthode d'apprentissage digne de ce nom est la méthode syllabique. La seule qui constitue la suite conforme au bon sens, la seule qui soit cohérente, qui tienne la route. Le reste n'est qu'élucubrations, assertions de gens de mauvaise foi.

Des exemples de mots à opposer phonologiquement ? Ils foisonnent. Je me limiterai à quelques exemples parlants : tir-tri, garde-grade, partie-patrie, carte-cadre, carpe-crabe, porter-border-broder, calmer-clamer, etc. Ces couples de mots sont empruntés au Lexique, ouvrage mentionné dans la bibliographie que vous trouverez ci-après.

À mes deux enfants, j'ai appris à lire dès le début des grandes vacances qui précèdent la rentrée scolaire de leur entrée en 1re année (CP en France). Les avantages ? Tout se fait dans le calme, dans la sérénité, certainement pas dans la précipitation, encore moins dans la panique. L'enfant n'est pas bousculé, pas déboussolé, ne perd pas les pédales, ne se décourage pas. Bref, il part du bon pied. Ce qui est essentiel pour lui et pour son entourage direct, familial.

Autre grand avantage : cet apport crée un lien relationnel fort - salutaire - et disons-le : durable, entre l'adulte et l'enfant. Indispensable au bon déroulement ultérieur de l'opération, de l'aide, du soutien tant matériel qu'affectif qui s'avérera nécessaire, indispensable. Ainsi esquissée, la démarche a tout lieu de réussir pleinement. Ce sera évidemment tout bénéfice pour le lecteur débutant.

Bibliographie sommaire

Nina CATACH, L'orthographe, Que sais-je ? n° 685, PUF
Claude THOMAS, Lexique pour lecteurs débutants et dyslexiques, chez l'auteur
Claude THOMAS et Cécile GODDARD, Lecture-écriture en 1re année, chez l'auteur

Comment bien asseoir une bonne orthographe de base chez le jeune enfant ?

Au début de l'apprentissage, c'est-à-dire en 1re année primaire, l'enseignement de la lecture se confond avec celui de l'orthographe. En effet, pour s'assurer que l'assemblage (f + a =  fa) d'une consonne avec une voyelle (exemples : la, le, me, ri, fa, fi, etc.) est bien acquis, rien de tel qu' un contrôle écrit sous la forme d'une dictée, très courte au demeurant.

Petite précision avant de continuer. L'assemblage concerne aussi - entre autres - le cas de la voyelle et de la consonne. Exemple : if.

L'orthographe s'acquiert surtout par la copie. Feu l'inspecteur VAN WAYENBERGHE avait coutume de dire que l'élève devait écrire au moins l'équivalent de deux heures par jour. On est loin du compte avec les trop nombreuses (et souvent inutiles) photocopies distribuées à nos enfants. Le vieil ANAXAGORE ne prétendait-il pas que si l'homme est intelligent, c'est parce qu'il a des mains. Tout, en définitive, est dans la motricité fine.

Une notion plus qu'importante - essentielle donc - est à prendre en considération. Il s'agit de la conscience phonologique. Des mots comme "sa" et "as" n'ont pas le même écoulement, c'est-à-dire que leur prononciation est différente. Chaque mot a donc sa prononciation propre. Sauf les homophones. Tout l'art sera donc de sensibiliser l'enfant à la différence phonologique, donc orthographique, existant entre des mots proches, auditivement parlant.

Exemples :

a)  fi - if
     rame - arme
     rôtie - ortie

b)  tir - tri
     garde - grade
     porche - proche
     dur - dru
     firme - frime
     turc - truc

"turc" et non "Turc" parce que la majuscule n'est abordée qu'en 2e année.

Ultérieurement (c'est-à-dire en fin de 1re année au plus tôt) :

c)  lapin - alpin
     rouler - ourler
     amateur - armateur

d)  calmer - clamer
     border - broder
     tour - trou
     écouter - écourter

Évidemment, si l'enfant ne comprend pas le mot, il y a lieu de le lui expliquer.

Votre rôle de parents n'est certes pas de remplacer l'instituteur ou l'institutrice de votre enfant. Mais de le/la seconder, oui assurément. Surtout : combler les lacunes dès qu'elles apparaissent. Sinon, le trou se creuse. Et le découragement fait ses premiers ravages.

En quoi votre aide (ponctuelle ?) consistera-t-elle ?

Pour ce qui est exclusivement de l'orthographe puisque c'est le sujet de l'article, lui faire copier un mot, au début ; une phrase par la suite, suivant donc son avancement. Et c'est ici qu'intervient la psychologie pour une large part dans le succès de votre démarche. Laissez-lui, dans la mesure du possible, le choix du mot à copier. Ou bien alternez : vous copiez un mot, puis c'est à son tour. Ou vice(-)versa. Il/elle vous demandera peut-être d'en copier plusieurs puisque vous êtes un(e) adulte. Si ça peut le/la consoler, pourquoi pas ? À vous d'imaginer d'autres astuces qui transformeront vite ces "devoirs" en parties dérivatives, à défaut d'être récréatives. On peut toujours rêver...

Mais avec de la bonne volonté de part et d'autre, on y arrive très souvent. Évidemment, ne prolongez pas ces séances. Un quart d'heure pour un(e) petit(e), c'est largement suffisant. En week-end par exemple, l'esprit est reposé et le temps disponible beaucoup plus important.

Avec le temps, cette copie deviendra plus intelligente si l'on peut dire. En ce sens que vous ferez varier certains éléments de la phrase.

Exemples (à partir de la 2e année)

Un petit garçon joue.
Une petite fille joue.

Deux petits garçons jouent.
Deux petites filles jouent.

1. Faire trouver les nouvelles terminaisons.

2. Faire justifier chaque fin de mot,
                        chaque "bout" de mot,
                        chaque élément final,
                        chaque terminaison
                        (comme disent les grandes personnes).

Pour mener à bien ce travail long et difficile, vous devrez être aidé(e).

Sinon, votre démarche sera vouée à l'échec. On ne s'improvise pas, en effet, précepteur ou préceptrice. On ne passe pas du statut de parent à celui d'enseignant du jour au lendemain. C'est un leurre de le croire et de le faire croire.

C'est pour pallier ce manque de professionnalisme que je vous convie fortement à vous procurer les ouvrages suivants de ma production. Qui ont été conçus pour les non-initiés. Il s'agit de :

- Lecture-écriture en 1re année,
- Lexique pour lecteurs débutants et dyslexiques,
- Grammaire-conjugaison-analyse-orthographe à l'école primaire.

Bonne chance ! Bon courage aussi ! Car il vous en faudra.

P.-S.  Ne faites surtout pas comme cette institutrice (elle se dit 'pédagogue diplômée' - sans doute par modestie !) qui oblige ses élèves de 1re année à écrire en imprimé. Quel non-sens ! Surtout que l'enfant n'éprouve aucune difficulté à écrire en cursive.

Faire grandir son enfant

Pour qu'il se réalise. Qu'il s'épanouisse pleinement ! Quel beau programme ! Vaste aussi. Le seul en fait qui en vaille la peine. Un défi de taille en vérité. Comment y parvenir ? Sur quoi s'appuyer ?

Constatons d'abord que le petit enfant est naturellement curieux. Que de questions il vous pose ! Des plus pertinentes aux plus farfelues. À nos yeux en tout cas. Mais toutes sont intéressantes, c'est-à-dire dignes d'intérêt. Quel levier ! Quel tremplin ! Oui, la curiosité bien comprise et le désir d'apprendre des petits sont des atouts majeurs dans l'édification de sa personnalité. Veillons donc à les laisser intacts et toujours en éveil. Des alliés de poids.

Ce jeune, il attend de nous une réponse. La façon dont nous allons y faire face va conditionner en partie du moins sa motivation, présente et future. Et, pourquoi pas, sa personnalité, cette manière d'être de chacun d'entre nous. Riche ou pauvre, transcendante ou non. Une fameuse responsabilité. Quasiment de tous les instants. En tout cas, souvent sollicitée.

Cette exigence postule une denrée rare de nos jours : la disponibilité. La clef de voûte du succès. Sans elle, rien n'est possible. Ou très difficilement.

Le petit aura vite compris que nous ne sommes pas des encyclopédies vivantes. Rien de déshonorant à cela. Reconnaître les limites de notre compétence n'a rien d'avilissant. Au contraire. On se grandit quand on reconnaît ses faiblesses, ses manques. Restons donc modestes : ce sera tout avantage pour nous et pour notre entourage.

C'est ici que le livre, cet ami fidèle, indéfectible, toujours disponible, d'humeur égale, va jouer tout son rôle, révéler son utilité. Fouiner : voilà le bonheur assuré pour de longues années. Que ce soit dans la bibliothèque familiale - si elle est suffisamment riche - ou publique. Et toujours cette connivence de bon aloi. Celle qui soude, qui unit, qui brave les difficultés, franchit allègrement les obstacles. Bref, qui vous blinde, vous aguerrit.

Les occasions ne manqueront pas : le travail scolaire dans toute sa diversité offre déjà un beau champ d'investigation. Les vacances seront une autre mine (d'or) inépuisable. Les moments de détente aussi. Sans oublier les loisirs. Et toutes ces tranches de vie passées en famille... à ne rien faire de bien précis, sinon peut-être à cultiver un esprit encore en friche en partie.

Les domaines varieront aussi : pour certains, ce sera la recherche du mot juste, approprié - rare peut-être -; pour d'autres, l'accomplissement d'une passion. Mais toujours, cette recherche jamais terminée d'un mieux-penser. Et, finalement, d'un mieux-être. Car penser, c'est en quelque sorte modeler notre personnalité, l'affiner pour la maîtriser davantage. À travers d'exercices nombreux et variés.

À cet égard, poser une question claire et précise postule déjà toute une gymnastique de l'esprit, de la pensée, un effort intellectuel non négligeable, surtout pour le petit. Entrent en jeu en effet : le choix des mots et la structure de l'ensemble ainsi produit. Pas si simple. Car le tout doit avoir un sens.

Quelques exemples d'exercices enrichissants, axés sur le vocabulaire et, plus généralement, sur le langage : rechercher le contraire, le synonyme, des mots appartenant à la même famille étymologique ; s'essayer à une définition, même approximative. Ce faisant, vous obligez votre enfant à entrer dans une logique, une démarche essentielle pour son développement. Ou encore faire une phrase à partir d'un mot donné. Libre à vous du reste d'imaginer d'autres formes d'entraînement, mais toujours en rapport avec l'âge de votre enfant.

Quand vous aurez amené votre enfant à consulter le dictionnaire - adapté à son âge, cela va de soi - en cas de doute, vous aurez accompli un chemin considérable. Et lui, il aura gagné beaucoup en autonomie. Une démarche qui va l'affranchir, l'affirmer. Indiscutablement. Et quel plaisir en perspective ! Faire comme les grands, quelle promotion ! Faire comme papa et maman, voilà le nec plus ultra. Le comble du bonheur. Non, il n'y a rien de mieux.

Profitons aussi de toutes les circonstances que la vie nous présente pour enrichir son vocabulaire qui est pauvre. Les promenades offriront des occasions inespérées d'étoffer son capital-mots. Surtout : surveillons le nôtre ! Faisons attention à notre façon de nous exprimer. Bref, montrons l'exemple. L'enfant nous imitera. Rien n'est plus contagieux que l'exemple.

La vie sociale d'un enfant se divise en deux temps forts : la vie familiale et la vie scolaire. C'est donc dans chacun de ces deux milieux que le jeune est appelé à se développer physiquement, mentalement, intellectuellement, sentimentalement, pour ne citer que les aspects principaux, essentiels de sa personnalité naissante. Faisons en sorte que cette entreprise de longue haleine soit couronnée de succès. Cela dépend de nous, de la vision que nous avons de son avenir, proche et lointain.

J'allais oublier le plus important peut-être : ne négligez en aucun cas la formation de son caractère. Par principe, on termine ce qu'on a commencé. Une règle d'or. Toujours s'y tenir. L'idéal à atteindre : l'autodiscipline. Bon courage ! Car il vous en faudra.

Pour un enseignement de qualité

Idéalement, chacun devrait recevoir un enseignement adapté à ses possibilités, intellectuelles s'entend. Mais aussi sans doute pécuniaires, financières. Que ce soit dans une société démocratique ou dans une république bananière. L'appétit intellectuel diffère en effet suivant les individus. Car un fait indiscutable, bien établi, a été perdu de vue depuis belle lurette : les aspirations, mais les besoins aussi, individuels sont variés. Par conséquent, niveler par le bas comme on le fait hélas ! trop souvent - sinon exclusivement - amène à des conditions déplorables tant pour l'individu que pour la société.

Un déficit culturel se manifeste, s'installe de plus en plus chez les enseignés. À qui la faute ? La psychologie nous apprend que la période de latence qui s'étend grosso modo de l'âge de cinq ans à la puberté est cette période calme, bénie où l'enfant est particulièrement réceptif. Profitons-en pour lui inculquer les notions de base, c'est-à-dire celles dont il ne pourra pas se passer. Plutôt que de le distraire par des gadgets faussement pédagogiques, éducatifs.

Il est peut-être bon de rappeler ici ce que la grande pédagogue italienne Maria MONTESSORI a appelé les périodes sensibles, c'est-à-dire les âges qui s'imposent pour l'apprentissage de la lecture et de l'écriture par exemple. Passé ces moments bénis (6-7 ans), l'assimilation, la maîtrise desdites matières se fera beaucoup plus difficilement. À cause notamment du peu d'intérêt que suscite alors cet apprentissage.

Tenez ! Cette réflexion avant de poursuivre. Avez-vous déjà remarqué que lorsque l'on parle d'une école dans un quotidien ou autre périodique - ou plus exactement d'une activité de celle-ci-, jamais le mot travail n'apparaît ? C'est toujours : mobilisation pour un projet ou quelque chose de ressemblant. Jamais non plus la production d'un travail personnel. Encore moins montrant une classe occupée à une activité d'écriture par exemple. Symptomatique, non ? Deux mots, en effet, qui semblent bannis du vocabulaire pédagogique actuel. Quid de la rédaction dans ces conditions ? Cette véritable stratégie de communication - quelque peu m'as-tu-vu, il faut bien le reconnaître - de certaines écoles fait plus penser à une campagne de marketing commercial qu'à une saine gestion d'une pédagogie bien comprise. Heureusement qu'il y a encore des écoles qui travaillent dans l'ombre. Sinon, ce serait désespérant.

L'école qui veut se montrer résolument exigeante - ce qui devrait être la norme et qui l'était par le passé - est tout de suite taxée d'élitiste. Le monde à l'envers, quoi.

Depuis bien longtemps, nos décideurs publics font fausse route. Reconnaître ses erreurs n'est nullement avilissant, mais bien au contraire, grandit celui qui reconnaît avoir fait fausse route, c'est-à-dire s'être trompé dans les moyens, dans la méthode à employer. Car la finalité bien comprise de toute éducation digne de ce nom n'est-elle pas de mener chacun au maximum de ses possibilités ? Ignorer cette finalité qui tombe sous le sens est se mettre en porte-à-faux et donc jouer à fond la carte de l'ambiguïté.

À méditer : "Une erreur ne devient une faute que lorsqu'on ne veut pas en démordre" (Ernst JÜNGER).

On peut toujours rêver et (faire) croire que cet égarement intellectuel est conçu, pensé pour le bien supérieur de l'individu. Ce faisant, on risque de provoquer chez la personne un réveil pour le moins pénible, brutal même, et peut-être en sursaut. Car cet enseigné devenu adulte devra immanquablement gagner sa vie, c'est-à-dire subvenir à ses besoins et à ceux de sa famille. Ce qui postule la maîtrise de certaines habilités. Faute de quoi, et plus grave encore, feindre de l'ignorer, constitue une tromperie, une duperie dévastatrice, lourde de conséquences, tant pour l'individu que pour la société dans laquelle il est appelé à vivre.

Une conséquence inéluctable, fâcheuse, déplorable de ce délabrement est la dévalorisation du diplôme. Plus aucun employeur - dans le privé en tout cas - n'y prête plus attention. S'il veut s'assurer de la maîtrise réelle d'une matière donnée, une langue étrangère par exemple ou même maternelle auprès du candidat, il lui fait passer une épreuve en rapport direct avec cette exigence. Quel désaveu ! Alors que ce document officiel devrait ouvrir toutes grandes les portes à son détenteur, c'est juste le contraire qui se produit : la méfiance. C'est horrible.

Inutile de faire un dessin. Décrocher un emploi convenable dans des conditions aussi précaires relève de l'utopie, presque du miracle. Et pourtant, c'est le lot quotidien de ces trop nombreux sous-qualifiés à cause, souvent, d'une éducation inadéquate, suite par exemple à une mauvaise orientation. Quelle qualité de vie attend ces pauvres bougres ! Et, dans bien des cas, quel calvaire !

Quand l'école ne joue plus son rôle social et sociétal de premier plan pour lequel elle est destinée - qui est donc le sien, autrement dit, quand elle tourne à vide, quand elle vit en vase clos, alors, oui, elle est en crise. En crise grave même. Profonde. Un dommage matériel et intellectuel incommensurable s'ensuit. Avec toutes ses conséquences dévastatrices, ravageuses. Bref, la désolation totale. Le dénuement complet, au propre comme au figuré. L'indigence dans toute sa cruauté. La précarité aussi. Qui mène immanquablement à la fragilité, sinon à l'instabilité. Quel tableau !

La jeunesse, l'avenir d'une nation ? Oui, assurément : c'est l'évidence même. Mais, comme dans notre Communauté francophone, le neuvième de sa population est analphabète, c'est plutôt mal parti. Alors que la connaissance est notre seule vraie richesse.

Entendu le 10 novembre 2004 vers 07 h 40 sur la Première lors de l'émission ÉCO MATIN, de la bouche de la correspondante de la RTBF à Londres, Florence BELLONE (je cite de mémoire) : "En Asie, on trouve une main-d'œuvre plus qualifiée et plus consciencieuse. Moins chère aussi." Ce qui expliquerait les trop nombreuses délocalisations (appelées outre-Manche relocalisations) vers l'Asie en général et vers l'Inde en particulier.

Qu'en pensent nos hommes - responsables - politiques ?

À méditer : La faute la plus grave que l'on puisse commettre contre la déontologie en éducation, c'est d'introduire des comportements éducatifs dont on est incapable de prévoir toutes les conséquences et de refuser une étude de celles-ci. (Jean SIMON, in La pédagogie expérimentale - Privat, 1972, p. 12.)

Les joutes intellectuelles auxquelles se livrent certains à propos de la lecture pourraient paraître amusantes si des générations d'enfants ne subissaient pas les conséquences de lubies pédagogiques parfois consternantes. Si, en médecine, les charlatans sont vite rappelés à l'ordre par l'aggravation de l'état de leurs malades, en pédagogie, certains "théoriciens" peuvent agir en toute impunité puisqu'il est d'usage de ne pas évaluer scientifiquement les résultats des "innovations". (Jean GUION, in Bulletin de la Société Alfred Binet et Théodore Simon, n° 577.)

En pédagogie, tout a été dit, rien n'a été prouvé. (Alfred Binet.)

Conclusion : Ces propos valent leur pesant d'or et se passeraient volontiers de commentaire s'ils ne nous plaçaient pas tous, brutalement, que nous soyons simples praticiens ou décideurs de tous ordres, devant nos lourdes responsabilités professionnelles. Oui, nous l'avons trop souvent oublié : il ne suffit pas d'innover, il faut aussi contrôler - de préférence scientifiquement - les résultats de ces innovations. Puissions-nous enfin en tenir compte pour le plus grand bien des enfants qui nous sont confiés !

L'Europe coule. À cause de son enseignement peu performant.

Voilà résumé le message de la dernière enquête du "Lisbon Council".

Conclusion peu réjouissante, il est vrai. À méditer de toute urgence par nos compétences, fédérales et surtout régionales. Car perdre la bataille de l'éducation et de la qualification, c'est aussi perdre celle de la compétition économique. Surtout quand on a comme rivaux des pays comme la Chine et l'Inde.

Dans la même veine :

"Si l'enseignement ne s'améliore pas, on peut oublier le redressement wallon."

"Si l'enseignement ne donne pas à nos jeunes les savoirs de base comme maîtriser une langue, calculer et résoudre des problèmes, il est inutile de parler encore de développement de la Région wallonne !

La Communauté française est un pouvoir qui les moyens d'orienter les choses. Si l'enseignement à Bruxelles et en Wallonie obtient des résultats aussi médiocres dans les comparaisons internationales, ce n'est pas la faute à pas de chance.

C'est le pouvoir politique qui a conduit l'enseignement dans l'état de dégradation où il se trouve aujourd'hui. C'est à lui de le sortir de là et d'offrir une chance à une population qui est en droit d'en avoir une."

Vincent REUTER, administrateur délégué de l'Union wallonne des entreprises.

Le mot de la fin revient à Marc Halévy, auteur de l'ouvrage L'Âge de la Connaissance - Principes et Réflexions sur la révolution noétique au XXI e siècle, aux éditions M2.

Extrait : "L'école est devenue une usine à fabriquer des analphabètes, des voyous et des chômeurs. La finalité pédagogique de base - apprendre à lire, écrire et compter - n'est même plus atteinte".

Encore ceci : "La plupart de mes étudiants de troisième cycle (bac + 4 ou 5) sont incapables d'écrire une seule page sans au moins une dizaine de fautes orthographiques et syntaxiques majeures (...)".

Êtes-vous déjà entré(e) dans une bibliothèque publique flamande ? Non ? Dommage. Vous y auriez constaté à quel point elle est fréquentée par des lecteurs et des lectrices assidus. Des tas de livres y sont effet empruntés.
Vous êtes-vous déjà rendu(e) à la Boekenbeurs à Anvers ? Là, ce sont de très nombreux livres qui sont achetés. Pour des sommes considérables.
Faites la même expérience dans nos bibliothèques et à la Foire du livre. Et constatez la différence. Criante. Évidente. Indiscutable.
Ma conclusion : nous avons fabriqué pendant des années des analphabètes - au mieux, des illettré(e)s. De futur(e)s assisté(e)s. Nous en payons maintenant les conséquences.


Et que dire de la politisation de l'enseignement officiel ?
Il n'y a plus que ça...

J'ai connu un directeur d'école normale qui ne s'est jamais présenté à un examen de promotion.
Et qui se retrouvait dans tous les jurys d'examen de promotion comme membre.
Le hasard fait parfois bien les choses... Trop bien parfois ! Trop souvent aussi !
Ses collègues le surnommaient "Modeste". C'est tout dire.
Sa devise : Pousse-toi de là. Que je m'y mette.
Un des fossoyeurs - encensé - de l'enseignement. Car il prônait la rénovation à tout crin.
On a vu ce que cela a donné...
Heureusement que sa "notoriété" ne dépassait pas le stade de la gazette locale.
Que Dieu ait son âme ! Mais pour un arriviste de cette espèce, ce sera peut-être (très) difficile...

La pénurie ? Elle est malheureusement en partie du moins organisée. Un exemple ? J'ai connu des instituteurs - pourtant (très) méritants - qui n'étaient pas repris par la direction en septembre. Parce qu'ils avaient le mauvais profil, c'est-à-dire le malheur d'être des hommes. En somme, c'était une chasse à l'homme déguisée. Ni plus ni moins. À tel point que la Flandre envisage d'accorder une prime aux hommes qui (re)viennent dans l'enseignement. Et chez les francophones ? Quel gâchis ! Et ne parlons pas des emplois réservés, une autre plaie d'envergure. Un véritable fléau dévastateur. Qui laisse - malheureusement - des traces indélébiles. Cela se pratique bien sûr (très) discrètement. Et, pour le dire plus nettement : sournoisement, secrètement.

La promotion de la femme ne doit pas se confondre avec le gavage d'oies que l'on connaît hélas ! actuellement. L'excès nuit en tout. C'est bien connu.

La mission de l'école
L'enseignant a été amputé de son autonomie. Il doit - impérativement - se fondre dans le groupe. Bref, se couler dans le moule. La seule voie possible pour lui. Son seul salut. Dur, dur ! Et c'est même beaucoup plus difficile. Pour certains en tout cas. Oui, penser individuellement lui est de facto interdit. Comment a-t-on pu en arriver là ?
Le but ultime de l'enseignement est, semble-t-il, d'apprendre à l'élève (à l'étudiant) à acquérir des connaissances utiles. La lecture fonctionnelle en est une. Qui lui serviront - de toute évidence - plus tard. Lui apprendre aussi à travailler. Un mot passé de mode. Pis encore : banni, ostracisé. Oui, absent de toutes les réformes. Étrange, n'est-il pas ? On est donc très loin du compte. Dommage. Car il faut bien le reconnaître : l'école a failli à sa tâche en négligeant cet aspect des choses. La preuve : l'adulte qui a été formé dans cet esprit est très vite dépassé par les événements dans la vie active. On ne compte plus en effet les "épuisés" professionnels. Voilà le drame actuel d'une éducation manifestement trop laxiste. L'école en a fait des inadaptés. Triste à mourir. Plus grave encore : un dommage incommensurable pour l'économie wallonne. Qui ne parvient pas de ce fait à se relever.

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Apprentissage de la lecture.